Les gens s’apostrophent, piaillent, rient. Elle est pas habituée à ça, Mannaz. Elle est sociable, elle aime les gens, mais cet après-midi c’est trop. Y a trop de gens partout (le monde est rendu fou). Alors la blonde s’éclipse du groupe avec qui elle est assise sur l’herbe, baille exagérément et prétexte un besoin irrépressible de sieste. La soirée de la veille a trop empiété sur la nuit, emportant avec elle quelques souvenirs et ne laissant qu’une désagréable sensation de marteau-piqueur dans la tête.

Mais elle a suffisamment dormi pour les trois prochaines années, ce dont elle a vraiment envie maintenant c’est de manger. Alors elle prend la direction des cuisines, qu’elle a déjà eu l’occasion d’expérimenter plus tôt dans la journée (avant de rencontrer M. Sol, dont l’aura dorée semble encore hanter l’esprit de la scandinave). Être au milieu des casseroles et des épluchures de légumes, c’est déjà un peu plus un terrain qu’elle connaît. Et ici, la magie ne marche pas. Elle a bien vu la rune sur la porte, mais elle a quand même essayé de lancer un petit recurvite pour les bols du petit-déjeuner - sans succès. Au moins, ici, elle n’est pas numéro 57. Si le classement était établi sur les compétences en cuisine, elle serait assurément dans le top 10.

Son esprit vagabonde pendant qu’elle coupe les fruits, allume la gazinière, mélange les ingrédients, remplit le moule. Elle essaie de mémoriser les visages des personnes rencontrées, mais elle a déjà oublié la moitié de leurs noms. Et puis ça détend vachement de faire des pâtes de fruits, alors après avoir préparé sa propre réserve, elle fait une deuxième tournée pour offrir aux autres - c’est le seul moyen qu’elle connaît pour se faire des amis, après tout. Elle descend prendre des framboises, parce que tout le monde aime les framboises. Puis pendant qu’elle est dans la réserve, elle entend du bruit au-dessus, petite souris à la recherche de nourriture (il est 16h30, l’heure du goûter). Sa tête passe la trappe au moment même où une pâte de fruit est engloutie. « Nooooooon ! » qu’elle s’écrie la gamine, avant de se rattraper. « J’ai pas encore fini, désolée, je dois encore les enrober de sucre. »  Jamais trop de sucre, après tout. « Mais y a des restes du petit-dej là si tu veux. » Elle rapproche une corbeille avec un reste de brioche et quelques pancakes. Et celle en face a pas l’air de trop comprendre ce qu’elle dit, c’est vrai que le sortilège de traduction marche pas ici. « Euuuuh. I’m Mannaz. You ? »