A peine vingt-quatre heures de passées ici, et Mannaz a déjà fait de la cuisine son endroit. Après avoir préparé le petit-déjeuner et cuisiné ses pâtes de fruits quelques heures plus tôt, elle est maintenant en train de faire la liste des menus de la semaine. Elle aime bien faire des listes, Mannaz. Des listes des livres qu’elle a lus, des listes de courses, des listes de choses à faire dans sa vie avant de mourir… Un peu plus tôt dans la journée, elle a compté scrupuleusement le nombre de tomates, les sacs de pommes de terre, les paquets de farine. Visiblement, ceux qui ont entreposé les provisions ont prévu pour un certain temps. Sauf pour les légumes et les fruits frais, ils risquent de manquer assez vite. Peut-être vont-ils être obligés d’aller faire pousser eux-mêmes leurs denrées ? Au moins, le climat s’y prête plutôt bien.

Elle est installée derrière la cuisine, à l’extérieur, pour profiter de l’air un peu plus frais en soirée. Il fait trop chaud ici, elle n’est pas habituée, la scandinave. Et surtout, elle n’est pas habituée à résister quand elle sait la nourriture disponible si près d’elle. Alors elle abandonne un instant ses menus – elle a encore le temps d’y réfléchir – et décide d’aller chercher quelque chose à grignoter à l’intérieur. Mais à peine a-t-elle franchi la porte que quelqu’un pousse un cri qui la fait. Un bol s’envole puis est rattrapé, et des mots sont prononcés dans une langue qu’elle ne connaît pas. Elle hausse les sourcils d’un air un peu dépité, pour signifier à la jeune fille qui lui fait face qu’elle ne comprend pas un mot de ce qu’elle a dit. Heureusement, elle s’en rend compte et reformule en un anglais basique – suffisamment pour que Mannaz puisse la comprendre. « Ohhhh sorry ! I think no one were here. » L’anglais est mal maîtrisé. Quelle idée stupide d’avoir interdit le sortilège de traduction au sein de la cuisine ! C’était un coup à ce que quelqu’un confonde les pommes avec des poires – ou pire, avec des figues. Bon, l’avantage, c’est qu’ils progresseront au moins en anglais (sauf s’ils parlent tous comme Galaad, là c’est plutôt mal parti). Heureusement, Mannaz comprend quand même ce que veut dire la jeune fille en face, qui mêle les gestes à la parole. « Oh, me too ! »  Le visage de Mannaz s’illumine, heureuse d’avoir trouvée une comparse avec qui partager un bout de pain. Après tout, c’est comme ça qu’on se fait des co-pains ♡ « You want cook cookies ? Or you prefer this ? » Elle montre le panier de fruits sur le plan de travail. Après tout, il vaut mieux manger un fruit en soirée, mais qui résisterait à des cookies ? Il faut surtout profiter du chocolat tant qu’il en reste. « I am Mannaz, from Durmstrang. And you ? »