La nuit avait été courte et agitée. Un sommeil sans songe, mais ampli de terreurs qui avaient maintenu Kitsune à la frontière entre l'aube et la nuit. Lorsqu'elle s'était finalement réveillée, le soleil commençait à répandre ses rayons sur l'île, et les espoirs de repos quittèrent définitivement le corps lasse de la jeune-fille. A pas silencieux, elle s'était dirigée vers la salle de bain de sa délégation, priant pour que l'eau brûlante ait quelques effets sur ses muscles endoloris. Son propre reflet dans le miroir la saisit, une fois mise à nue. Les écchymoses de la semaines précédentes s'évanouissaient sous une peau laiteuse, mais une cicatrice barrait à présent sa poitrine, rappelant les affres de la veille. Un soupir las lui échappa. Ce n'était pas joli à voir, mais l'esthétique lui importait guère. Les souvenirs troubles, eux, en revanche, étaient plus compliqués à gérer. Elle avait besoin de se vider l'esprit. De se perdre corps et âme dans une activité qui emporterait au loin la guerre pourtant si présente tout autour d'eux. Un éclair, une idée, illumina alors son corps. Tenue de circonstance enfilée, petit déjeuner à peine avalé, elle embarque dans un sac tout ce dont elle a besoin pour s'installer dans la forge. Les événements récents l'avaient presque amenée à oublier la proposition du dieu forgeron.

Le pas était rapide, précipité. Trahissait une hâte qu'elle n'essayait pas de dissimuler. Arrivée devant la porte de la forge, elle y frappe trois grands coups, espérant que le professeur s'y trouve. Sinon, elle irait à son bureau. Et s'il n'y était pas en cet heure matinale, elle le trouverait ailleurs. Déterminée, Kitsune comptait bien adonner sa matinée à apprendre un nouvel art, ou au moins à perfectionner le sien. Et ce que femme veut, les dieux consentent à le lui accorder.

De justesse, Kitsune retient un "oh" lorsque le professeur lui ouvre la porte. Elle ne s'était pas attendu à le voir dans pareille tenue. Doucement, elle secoue la tête. Elle n'était pas là pour ça. N'était même pas d'humeur. Quoiqu'elle fasse, elle ressentait en permanence les douleurs causées par l'hypogriffe, et ses yeux jouaient sans cesse les scènes apocalyptiques provoquées par un dragon. Si sa famille savait ... Elle pouvait d'ici imaginer leurs airs mi-effrayés mi-dégoûtés par la nature profonde de leur fille. Elle-même s'interrogeait quand à savoir si tout cela était bien réel, ou s'il ne s'agissait que d'un interminable cauchemar, entrecoupés de visions agréables, comme là qui venait de se présenter à elle, pour lui accorder quelque répit. Chassant les pensées dans un coins de son esprit, elle entre sans un mot, et accepte volontiers le café qui lui est tendu. Voilà qui achèvera sans doute de la rendre un minimum alerte. Le minimum requis, en tout cas, lorsqu'on se tenait à proximité d'un véritable brasier. "Merci" répond-t-elle sobrement, avant de déposer son sac sur le sol, tournant sciemment le dos au forgeron. Vulcain, dans la mythologie, n'était-il pas censé être le plus laid des dieux ? Il y avait mensonge sur la marchandise. "J'espère que je ne te dérange pas, mais je ne supportais plus le silence du dortoir" elle se rend compte que sa propre voix est plus grave, plus rauque que d'ordinaire. La lassitude s'en est emparée, et la fait froncer des yeux. Heureusement, le professeur enchaîne vite sur des sujets autrement plus réjouissants. Les projets de Kitsune ? Oh, sur le moment, elle a bien une idée ou deux qui lui arrache un sourire. Un peu piteux, un peu crispé, mais un sourire quand même. Heureusement pour lui, Vulcain ramène la conversation à la fabrication. Heureusement pour elle, dont le jugement risquait d'être obscurci par la fatigue. Aussitôt ses dernières syllabes prononcées, Kit sort trois carnets de son sac. C'est deux de plus que ce qu'elle avait ramené sur l'île. Les événements récents, bien que dramatiques, avait stimulé sa créativité. Elle accourt vers le dieu, sans discuter, prête à se mettre au travail. "J'ai pas mal de trucs en tête, des trucs plus ou moins gros, plus ou moins compliqué" pensée émue pour l'Oiseau Tonnerre mécanique qui promettait d'être trop ambitieux pour le matériel et les ressources humaines dont ils bénéficiaient. Quoiqu'un Dragon mécanique ... Bref, focus, Kit. "Mais pour commencer gentiment, je pensais à un vif d'or" la japonaise n'est pas amatrice de Quidditch, et son dernier vol sur balais lui faisait apprécier le sol bien davantage encore qu'auparavant. Aussi, rajoute-t-elle dans la hâte "Mais de surveillance. Un peu comme des globes occulaires qui volent rapidement, et qui enregistre tout ce qu'ils voient pour ensuite l'envoyer sur un écran. Tu vois le genre ?" l'image était un peu répugnante, certes, mais ... au moins était-elle évocatrice "Mais il faudrait que ça ressemble vraiment à un vif d'or, histoire que ce soit pas cramé" finit-elle dans un petit sourire, pas convaincue de sa blague. Kitsune, on t'a servi du café, bois-le s'il te plait.

Fusion: