Déjà deux problèmes de réglés (enfin on espère, on verra bien) pour une matinée, efficace la journée. Détour par la salle des profs, café, tasse - non, finalement, cafetière et deux tasses. Défait de ses lunettes de soleil des mauvais jours, sans rien pour dissimuler les yeux explosés. Marche précautionneuse jusqu'au sous-sol, pas renverser une goutte dans les escaliers.

Arrivée discrète foutue en l'air par les pas traînants et le floc floc du nectar de vie qui se balance dans sa carafe. Française déjà sur place mais son retard devrait être excusé par l'offrande. Médecin garde le silence quelque temps, iris inspectent soigneusement la silhouette - son visage, sa posture, chaque parcelle de peau visible. Guette le moindre signe qu'elle se soit remise, ou pas, de la veille. « Café ? » Geste joint à la parole, il tend une tasse, la remplira si l'autre la prend.

La fixe, encore, derrière les verres teintés. Reproches au bord des lèvres, trop sèches pour être jetées à peine débarqué. On part sur une entrée en matière progressive, alors. « Bien.. Remise d'hier ? » Il fait rarement ça Ortiz, tourner autour du pot au lieu de juste jeter sa hargne ou ses inquiétudes, sait même pas trop comment y jouer. Si c'était une autre il aurait même pas hésité - avec elle, même avec le temps passé, on prend toujours des gants.

Elle avait passée sa matinée à tester les armes pour être certaine qu'elle ne se ferait pas taper sur les doigts pour mort accidentelle par tir de balle en plein coeur. Il ne lui restait plus qu'à tout mettre en boite, ensorceler les boites, activer les colliers, et vérifier que les caméras fonctionnaient bien pour filmer les combats. Bon, elle avait pas fini quoi. Fort heureusement pour elle, Ortiz n'allait pas tarder à débarquer pour lui filer un coup de main. Ils ne s'étaient croisés que brièvement la veille lorsqu'elle était venue lui dérober du dictame après son combat contre Wunjo. Qui avait d'ailleurs réussis à reprendre conscience et partir du sous-sol puisqu'elle ne l'avait pas trouvé à moitié mort ce matin en se pointant sur place.
Elle n'avait plus de plaies ouvertes grâce à la potion, seulement encore des bleus qu'elle avait camouflé d'un sortilège de maquillage pour qu'ils ne soient plus visibles à l'oeil nu. Elle avait encore mal au visage en revanche, la douleur était pas passée pendant la nuit, il allait sans doute falloir attendre demain avant qu'elle n'en soit débarrassée.

Le russe finit par pointer le bout de son nez, vision céleste que son arrivée lorsqu'elle constate qu'il a apporté du café. Retard pardonné. Elle le voit la scanner pour vérifier le moindre reste, dommage pour lui, elle était douée en camouflage de morflage. Elle hoche la tête tout sourire à la proposition de caféine "avec plaisir."
Elle sent une certaine tension cependant lorsqu'elle attrape la tasse. Son geste se fait plus lent alors qu'elle essaie de cerner quel genre de regard il peut afficher derrière ses lunettes noires. La question n'est pas anodine, il l'avait à peine vue hier pour cerner suffisamment l'étendue de ses blessures, mais il semblerait qu'il soit au courant qu'elle aurait besoins de plus d'une nuit pour s'en remettre. "Très bien remise, je me suis juste entrainée t'inquiète, rien de bien méchant." elle sirote une gorgée de café après son mensonge, les yeux rivés au sorcier "toi, t'as l'air claqué" qu'elle ajoute, sous entendu pour savoir si il avait croisé Wunjo à tout hasard.

Mensonge poli ou stricte invitation à plutôt se mêler de ce qui le concerne directement, c’est difficile à déterminer pour le russe. Le second serait hypocrite, puisqu’il est, en fait, en première ligne pour porter les conséquences. Rien que par sa fonction de médecin, il est tout de suite impliqué. Inquiétudes professionnelles, intrusion justifiée qu’il décide.
Il chasse la remarque, la fatigue et la matinée d’un quart-de-sourire désabusé. « T’as foutu ma nuit en l’air. » Regard ne flanche pas, soutient droit celui de la française. Pas qu’il ait passé un si mauvais moment en vérité. Il aurait juste mieux aimé un autre déclencheur. Moins brutal. « Ça m’dérange pas trop en soit.. » Il hésite, se mord l’intérieur de la joue. Faudrait pas non plus qu’il paraisse touché pour de mauvaises raisons. « Mais tes "entraînements" t’pourrais au moins m'les ramener en personne. » Plutôt que les laisser agoniser on ne sait où.

Elle ne flanche pas lorsqu'il soutient son regard en déclarant plus honnêtement qu'il avait passée la nuit
à dorloter le scandinave. Elle se permet quand même de lever les yeux au ciel, une nuit entière à se faire soigner ? Mouais, elle ne l'avait pas assez tabassé pour ça, quand même, elle savait faire preuve d'un minimum de miséricorde.
Mais lorsqu'il parle de son absence d'assistance à personne en danger elle soupire exaspérée avec une théatralité volontaire. "C'est bon je l'ai pas laissé pour mort non plus." Si, c'était complètement ce qu'elle avait fait, il était tombé dans les pommes, il était seul dans le sous-sol, et à cette heure-ci, les chances que quelqu'un passe par là étaient faibles. Mais la mauvaise foie était de mise avec la diablesse. "Et puis moi aussi j'avais besoins de soins d'urgence, normal que je prenne soins de moi avant tout." Argument implacable, de mauvaise fois aussi, mais juste, de son point de vue à elle en tout cas. "Et contrairement à Wunjo qui vient se plaindre à toi comme un enfant, moi j'ai eu la défense de prendre de quoi me soigner seule et ne pas foutre ta nuit en l'air."

Battement de cils devant de grands yeux surpris, mine interdite. Il comprend pas, non, qu'on dresse de telles priorités. Pas plus qu'il sache lire dans les rivalités. Il parle violence Ortiz, quand elle est nécessaire ou quand les cœurs sont fous et les mots sont sourds, quand d'une façon elle résout tout. Elle s'éteint sur une mort ou des sourires réparés, quand elle est justifiée. La leur échappe. La mine  défaite de l'un, les piques hautaines de l'autre, elles promettent qu'ils ne jouent pas entre amis, qu'il n'y a aucun soleil sur les joues quand tout est fini. « Pourquoi vous faites ça ? » Mi-voix peiné. Slave voit tout monochrome, les bons et les mauvais, son camp et l'adversaire, les maudits et les bien-nés. Et l'amie, d'ordinaire, est bon juge de caractère. Tête penche de côté, les iris se font plus sérieuses pour continuer.

Elle sent qu'il ne partage pas sa légèreté d'esprit quand aux évènements, sans grande surprise cependant, elle savait qu'il n'approuverait pas, la violence gratuite, c'était pas son truc. Sauf qu'elle était loin d'être gratuite la violence dans ce cas-là.
Mais ça lui fait quand même un peu mal de le voir comme ça, elle a pas beaucoup de personnes qu'elle peu qualifier d'amis la diablesse, alors lorsqu'elle leur cause une quelconque peine, ça la fait chier et elle culpabilise, un peu. Pas pour autant qu'elle regrette. Avec Wunjo, elle campe sur ses positions.
"Les belles paroles, parfois ça suffit plus." Elle soupire, accroche le regard d'Ortiz pour qu'il imprime bien ce qu'elle va dire. "T'as jamais remarquée cette tendance qu'ont les gens à s'excuser mais toujours refaire les mêmes conneries ? S'excuser comme si ça suffisait à clore un incident ? A croire que leur pardon, il est destiné à leur prochaine erreur." Elle boit une nouvelle gorgée de café "T'es bien placé pour savoir que les mots ça veut rien dire pour moi, seul les actes comptent. Parce qu'on peut faire des promesses en l'air, mais les actions, ça, c'est concret."