Pas rapide claque contre le marbre des halés - même si talons amplifiant habituellement l'écho on été délaissés. Ou plutôt métamorphosé - en basket, mais ça, c'est un détail. Détail type : faut bien exploiter l'avantage d'être une sorcière quoi. Silhouette valse près des murs - glisse, le long des bureaux. Ambres scrutant plaques gravés - étrangère trainait trop peu dans cette partie du bâtiment pour avoir retenue l'ordre des bureaux; pas vraiment dans ses habitudes de courir les enseignants de l'île. Cherche celle désirée - pas se stop net lorsque finalement trouvée. Bordel, elle aurait jamais cru que pouvait y avoir autant de portes dans un seul couloir - ni que y avait autant de profs sur l'île. On sent l'élève assidue - non.

Wunjo. S'attarde une dernière fois sur la gravure ornant la prote - juste pour être sur de pas se planter, elle aurait l'air encore plus conne que d'habitude. Y abat le poing - deux fois, coups secs. Attends quelques secondes - trois ou quatre environ, avant de rentrer. Pas même certaine d'entendre l'autorisation. Bon, y avait du progrès quant à la politesse - mais c'était toujours pas ça, clairement. « Dites, ça fait bien partie d'votre contrat de prof de donner des cours particuliers si on vous l'demande ?» Ouais donc, la politesse, toujours pas ça hein. Bonjour, s'il vous pait, tout ça tout ça... Au moins le vouvoiement était présent, c'était toujours ça de prit. Éternelle attitude nonchalante, porte thermos opaque aux lèvres, regard accroché à la silhouette de la " Joie ". La joie... La joie qui lui retournait bien la tête aujourd'hui.

Deux coups secs à sa porte, Wunjo sursaute. Il se relève d’un coup sec, se retrouve en position assise sur le canapé, son épais livre glisse sur ses genoux. Il n’était pas du tout allongé, non. Il ne répond pas d’entrer, juste le temps de se frotter les yeux, parce qu’il n’était pas du tout en train de dormir, non.
Il avait verrouillé la porte de toute façon, il n’avait qu’à faire le mort, et l’intru finirait bien par s’en aller. Alors, il plaça le bouquin sur le canapé, sans faire de bruit.

Qui sur cette île avait su qu’on pouvait le trouver ici ? S’il y avait bien un endroit où un professeur de combat ne se retrouvait jamais, c’était dans son propre bureau. On le lui avait donné par politesse, mais il ne s’en servait jamais, ou très peu. S’il avait besoin de s’installer quelque part pour être au calme, il y avait toujours la salle des professeurs ; elle avait une machine à café, elle.
Ce bureau, sans personne à qui sourire ni technologie moldue distribuant caféine à tout va, il ne servait preque à personne. Encore moins à Wunjo. Même s’il y avait son nom d’écrit dessus. Alors c’était son point sieste. Toujours utile, parce que Wunjo était toujours fatigué. La nuit ça ne servait pas à dormir, de toute évidence.

D’habitude, quand on trouvait Wunjo c’était soit en salle des profs, à se faire un café, soit à la cuisine, en train de se faire un café parce que la machine de la salle des profs ne fonctionnait pas, soit au sous-sol, là où il travaillait véritablement. Bah ouais, c’est le prof de duel, quoi.

Mais horreur, la porte s’ouvre.

Wunjo, dans sa somnolence de fin d’après-midi, n’avait pas du tout oublié de la fermer à clé, non. Ses entrailles se tordent de surprise, c’était ce qu’il fallait pour le réveiller. Il se leva d’un bond. En face de lui, jeune femme qu’il n’arrive que très peu à replacer. Une élève, ça c’était sûr, mais laquelle ?

En attendant que ce mystère ne soit élucidé, un large sourire (sa marque de fabrique, disons) s’élargit sur le visage de Wunjo. Officiellement, en quoi pouvait-il bien l’aider en cette fin d’après-midi ? Quelque chose d’intéressant, à coups sûrs ! Officieusement, était-elle réellement intéressée à l’idée d’entraînements en tête-à-tête, ou était-elle là pour autre chose ?

« Mais tout-à-fait ! Il n’y a qu’à demander. »

Y avait un truc qu'elle aurait jamais pensée ressentir à la vu d'un enseignant sur l'île, Viviane : de la joie. La joie que Wunjo (la joie elle-même en plus, pompo combo) soit dans son bureau - elle n'aurait donc pas à se taper le tour de toute l'île pour le chercher. Merci les réflexions tellement basiques qu'elle trouvait ça évident qu'un prof, en dehors de ses heures de cours, soit dans son bureau lorsqu'il en avait un. Puis p'têtre merci l'intuition aussi - la meilleure arme d'une femme ça.

Ambres s'attardent sur la silhouette - impression de déranger, sans comprendre qu'elle surprend. S'interroge un instant - relève celui suivant le sourire qui est esquissé. Si elle dérangeait vraiment, l'enseignant l'aurait sans doute déjà foutu dehors. Expose alors simplement la requête - enfin demande plutôt si elle a raison de penser qu'elle peut demander un cours particulier. Il n’y a qu’à demander. C'était pas ce qu'elle venait de faire ? Ça comptait pas comme une demande ça ? Non Viviane, non.


« Vous voulez bien m'donner une leçon privée de duel ?» Wait... Elle demandait du taff en plus et elle faisait presque ça correctement ? Il manquait un " s'il vous plait " et ça aurait été parfait - mais ça aurait finit de lui écorcher les lèvres aussi. « Maintenant, par exemple ? Enfin sauf si vous avez mieux à faire hein.» Ça se prenait pas du tout pour une reine - à demander pour l'instant suivant. Ambres se posent sur le livre délaissé sur le canapé, sous-entendu inaudible - peut-être que lire c'était " avoir mieux à faire ". Elle ne sourit pas, elle - tire toujours la gueule, sauf lorsqu'elle se fout de la gueule de son interlocuteur. Or là c'est pas le cas. P'têtre même un peu trop sérieuse.

Un sourire bienveillant sur les lèvres, il hocha la tête. « Bien-sûr, quand ça t’arrange » répondait-il. Quand ça arrangeait l’élève, juste le temps pour que le professeur puisse noter son nom et aller réviser son dossier. Officiellement, pour se renseigner sur le type d’aide dont elle aurait le plus besoin ; officieusement pour savoir concrètement à qui il s’adressait. Et à quel type de demande il avait affaire.

Il fut un peu surpris, décontenancé, déçu, de voir qu’il ne pourrait s’offrir ce luxe. Haussement de sourcils, sourire qui se fige quelques instants le temps de réfléchir. « Ah, eh bien très bien. Pas de soucis » reprit-il, souriant à nouveau. Pas vraiment d’humeur à négocier au réveil, le professeur avait instinctivement trouvé plus simple d’accepter sans broncher plutôt que d’essayer de trouver un créneau libre de sieste. Mais un petit entraînement, c’était parfait pour se réveiller avant la soirée, se disait-il, incapable de ne voir que le négatif d’une situation.

Laissant l’épais ouvrage sur le canapé - celui-ci retrouvera bien la bibliothèque de lui-même après quelques temps - Wunjo se mit en route. Il passa devant la jeune femme, qu’il gratifia d’un « Allons ! ». Son regard bleu ne lâchait pas le visage de la recrue, parce qu’il se devait de pouvoir l’identifier. Non seulement parce que c’était la honte de ne toujours pas savoir comment elle s’appelait, mais surtout parce qu’il se méfiait toujours un peu de ce genre de demandes.
Elle n’était pas très souriante, pas parfaitement polie non plus (un « s’il vous plaît » n’était jamais de trop), mais Wunjo avait rapidement pris l’habitude. Ils avaient tous de sacrés caractères, sur cette île. Et cela ne l’empêchait jamais de sourire ; il espérait - probablement en vain - que d’autres prennent le pli.

« Est-ce qu’il y a quelque chose en particulier que tu souhaites que l’on voit ensemble ? Si tu as des questions, surtout n'hésite pas. »
Ouais, pose-les maintenant, qu’on gagne du temps.

Sourire persiste - s'étire. Dame qui n'en a pas forcément l'habitude - plus habitué à tirer la gueule. Était du genre à attribuer sourire éternelle à ceux hypocrites. De ceux qui devait sans doute régner en maître au sein des sphères politiques, juridiques, tous ces vastes univers faramineux là. Ou aux mômes insouciants aussi. Et p'têtre un peu au con également - et probablement à trop de monde, finalement.

Admire le semblant de surprise que sembla engendré sa requête soudaine - pas même embarrassée, elle en était plutôt amusée. Étrangère qui était de ceux qui s'aimait à surprendre et prendre, de court. Puis s'attarder sur les réactions réponses - ça en disait long sur une personne, qu'on lui avait toujours dit. Et ça lui donnait une excuse pour emmerder son monde, aussi.

Finalement silhouette défile - invitation aux airs d'ordre file. Chimère emboite le pas au finlandais sans broncher ni interroger - tient, vraisemblablement assez intelligente et mature pour ne pas demander où ils allaient. Miracle. Relève cependant les prunelles bleutés qui ne semblaient pas quitter son visage. Elle avait pas une gueule de rhododendron pourtant - n'était pas multicolore - pour faire la métaphore avec les fleurs aux couleurs variés, pour être dévisagé de la sorte. Enfin aux dernières nouvelles. « Quoi ? J'ai quelque chose sur le visage ?» Interroge - nonchalante, sourcil légèrement haussé. « Ou c'est juste que j'suis à vôtre goût peut-être ?» Attention apocalypse in coming : elle souriait. Sourire provocant.

« Plutôt les sortilèges entravant ou offensifs, ce qui serait le plus utile en mission.» Répond simplement - et exposait un peu, aussi, l'origine de la requête si soudaine : éviter de se faire dézinguer en mission. Entre autre.
L'art de rouziguer, l'étrangère extirpa un fruit de sa poche et le grignota en deux secondes trente. C'était important d'prendre des forces avant de se battre, eh. « Pas de question, juste une requête : j'ai un cours ce soir. Si j'pouvais encore tenir debout pour y aller, ce serait cool.»

« Heu… Non. Désolé mais je ne me mélange pas avec les recrues.   »  
Moue décontenancée face à tant de culot. Était-ce véritablement une manière de s’adresser à un professeur qui acceptait de vous offrir quelques leçons particulières, jeune demoiselle ? Un sourcil haussé, un sourcil froncé, sourire qui s’efface, nez qui se plisse. Était-elle juste venue pour le draguer ? Etait-ce juste ça, le fin fond de l’histoire ? Désolé, mais il n’était vraiment pas convaincu.
Wunjo allait devoir la jeter sur les roses. Parlez d’une conversation gênante. Cela suffit à lui faire détourner le regard, vers le chemin qu’ils empruntaient, les escaliers qui descendaient au sous-sol.

Ils y arrivèrent bien assez vite. L’espace était vide, large et dégagé. Ils seraient tranquilles. Wunjo bailla discrètement.
« Si tu veux tenir debout pour ton cours de ce soir, il va falloir le mériter. C’est un cours de duel, on peut difficilement se contenter de la théorie. » répondit-il à la seule demande de la jeune femme. Il n’avait pas véritablement l’air désolé de ne pouvoir répondre à sa seule exigence, parce qu’elle aurait dû savoir ce dans quoi elle s’aventurait en venant voir Wunjo.
Le professeur fit apparaître un mannequin d’entraînement. (Quelle était pratique, cette salle d’entraînement !) Il se tenait debout, droit comme un pic. Il tenait un lourd plateau dans ses mains, avec de la vaisselle posée dessus.
« Mais on peut commencer tranquillement, reprenait-il. En mission tu peut être amenée à devoir être discrète. Neutralise le sans le tuer, et sans faire le moindre bruit. Imagine qu’il y a d’autres ennemis dans le coin, qui ne doivent pas te repérer. Je te regarde faire, et on en discute après. »
Il espérait réussir à l’occuper assez pour ne pas avoir à trop se fatiguer, et pour la tenir à l’écart. Il n’avait vraiment pas envie qu’elle tente quelque manière de rapprochement avec lui. Qu’elle se contente d’approcher le mannequin. (Pas Wunjo ; le mannequin d’entraînement )

Wunjo s’appuya sur l’un des bureaux qui était poussé contre le mur. Machinalement il cherchait une tasse de café, il n’y en avait pas. Il se contenta de croiser les bras, la baguette dans une main.