Froid – journal fourré entre les mains, les autres recrues partent en direction du bâtiment principal alors qu’elle est solitaire assise au réfectoire. Relit une dernière fois les rumeurs, parce que c’est là que semble être les informations les plus bancales, les plus ennuyantes. Soupire, fièvre est tombée, ou peut-être pas, n’en est pas trop certaine. Ca la rend malade – pas le papier entre les mains, ni les mots qui y sont rédigés. Lune a besoin du Soleil. Du sien. Et meurt de ne pas l’avoir vu depuis dimanche soir. De ne pas connaître l’état actuel même si a toute confiance en Uruz. Elle devrait suivre le mouvement, se faire petite comme d’habitude, seulement ombre qui passe. Mais les jambes l’amènent tout droit au dortoir du loup. Astre ne toque pas cette fois-ci, se faufile d’un tour de baguette à l’intérieur et monte les marches jusqu’à la chambre des garçons – comme elle avait cru comprendre lors de sa première visite. Porte ne grince pas lorsqu’elle est poussée et la Lune racle le mur pour rentrer, cherche des prunelles bleues la silhouette de son homme.

Tambourine le cœur qui trouve l’âme-sœur, tant inquiet de voir l’état, d’avoir rêvé les soins, qu’heureux de sentir la présence chérie. Elle avance, à pas de loup – ironie – jusqu’au lit. Les épaules se détendent à mesure qu’elle s’approche, respiration de son homme faisant soulever et s’abaisser dans un rythme régulier le torse. Appelle une première fois le nom, léger, douce brise pour le réveiller si ce n’est pas encore fait – puis laisse le silence régner, parce qu’après tout, il a besoin de se reposer. Sourire se dessine, rassuré, creusé – mélange de sentiments contradictoires qui imprègnent chacun de ses gestes, chacune de ses hésitations. Passe une main dans les cheveux détachés - courts, bien plus qu'avant, s'arrêtant aux épaules à présent. Aimer et protéger n’allant plus de paire, mais ne résiste pas à la tentation et finit, enfin, par se glisser sous les draps.

Torse est nu – plaisir coupable, parce qu’elle se doute que comme elle, il a du mal à supporter les tissus rêches, mais que tout de même, la vision lui plaît. Sourire étiré une fois dans ses bras – perdu alors qu’il tente d’enrouler le blesser pour la rapprocher. « Ne bouge pas. » Soufflé en ordre doux. Ce n’est pas le moment d’empirer le cas. Paumes parcourent le visage, yeux s’habitue à l’obscurité. Barbe de trois jours semble combler ce qu’il manque au-dessus, ça ne la dérange pas, elle redécouvre un autre Raidho, en apprécie toujours les contours – au point qu’elle-même se trouve malsaine. Garçon suit la prophétie, ouvre les yeux après la fin du baiser. D’habitude, ce sont les princes charmants qui sauvent leur princesse du coma et du dragon. Nuit rit à la pensée, sans la partager – comprend déjà la frustration du loup quant à ce qu’il s’est passé, quant à la promesse sur le point d’être rompue. Mais il est en vie. Et c’est tous ce qui compte.

Lumière éclaire, marque avec horreur les blessures, la peau, le cheveux court. Tandis qu’il se redresse, elle se positionne en face, sondant les traits – apprenant surtout à s’habituer à cette nouvelle apparence, plus crue, plus dure – et surtout douloureuse de ce qu’elle crée en lui. Fatigue, souffrance – mais bien vivant. Et joie, bon sang, de se rendre compte qu’il est bien là, devant elle, qu’elle peut le toucher malgré les cicatrices, l’embrasser encore et qu’il entendra tous ce qu’elle dit, qu’il lui parle aussi – et qu’elle écoute autant alors. Qu’elle peut encore aimer et ressentir son amour. Et surtout qu’elle n’a pas raté cette occasion de le lui dire.



La main passe sur les cheveux, dessine les contours où ils sont absents, soupire de soulagement, cœur lourd s'oublie, laisse place à l'euphorie. « Je suis contente. » C'est un euphémisme, mais il le sait, que les langues manquent de mots transcendant jusqu'à l'âme. Que leur nous ne s'explique pas, pas plus que ce qu'il reste au bout de la langue.