Et la Shishi-guépard pétrifiée, sur son rocher perchée, se met à hurler. Hurlement glacial, à paralyser de terreur les manants en contrebas. Il ne cesse que lorsqu'elle prend une longue inspiration, comme si elle aspirait quelque chose. En face, l'autre Shishi, toute aussi immobile, semble se vider. Peau devenant plus grise, regard plus vitreux, s'effondre sans vie. Et au moment où son corps heurte le sol, l'hurleuse se transforme. Son corps s'allonge, se tord, se met à ressembler à Slenderman. La créature pousse un dernier cri avant de quitter le sol, s'envolant vers la forêt et disparaissant parmi les cimes.

Autre cri qui retentit. Plus aigu, plus outré. Aonyobo est apparu non loin du cadavre de son élève, traits tirés par la contrariété. "Yamaguchi-chan !" qu'elle appelle, pour la faire se relever. Elle attend deux secondes, constate que ça ne marche pas. Air embêté, elle relève les yeux vers la scène, pâlit. C'est le désordre total, rien ne va, pas l'ombre de la moindre symétrie. Elle n'est pas bien Aonyobo, elle se reprend cependant. "Heureuse de constater que vous aller bien ♡" Enfin bien... Ils ont eu la délicatesse de ne pas mourir quoi. Pas comme Shishi. Non, ça ne va pas du tout ça, c'était la numéro deux quand même. "Vous avez donc pu constater le pouvoir de la collaboration. Très important. presque autant que celui de l'amitié." Elle récite un peu les phrases de shonen - des scènes où l'émotion est à son comble - jetant des regards embarrassés à Shishi le cadavre. "Kitsune-chan" appelle-t-elle. "Tu vas m'aider à transporter ta camarade... Vous autres, rangez moi ça, c'est..." Trop dérangé pour ses névroses. Une formule en japonais - mots prononcés d'un ton doux - et le corps se soulève délicatement du sol. Aonyobo prend à peine le temps d'attendre Kitsune - elle ne voudrait pas que la numéro un se casse un ongle en nettoyant les débris - avant de prendre le chemin du dortoir des Mahoutokoro.

hrp. merci d'avoir participé ♡
ça vous servira pour plus tard ♡

De la cuisine, il est difficile de capter grand-chose à ce qu’il se passe dehors – on peut entendre des gens beugler, d’autres crier – tout au plus ils auraient pu observer Mizuchi grimper ou les jets de pierres, la fumée au loin, preuve que quelqu’un avait mis le feu. La terreur se trouve davantage dans l’imagination, finalement, à s’inquiéter pour la vie des camarades, de celle de Shishi aussi, qui peut être inferi ou pire au vu des maigres connaissances qu’on lui a enseignés. Puis du calme, soudain – percé par un hurlement, qui résonne un peu dans l’esprit avant qu’une silhouette s’envole – créature mystérieuse qu’elle pense être à l’origine du chaos. Il faudrait la chasser peut-être, mais la folie doit régner en maîtresse parmi les troupes. « Tu penses qu’elle est morte, Shishi ? » La voix se brise sur le nom alors qu’elle interroge @Raidho qui ne la lâche plus visiblement – et ça la rassure, de l’avoir avec elle.

Ca n’a pas duré si longtemps, cette attaque, mais le temps semble long quand on ne peut qu’observer, sans pouvoir agir ou aider. Elle espère tout de même que son dernier sort a aidé, un peu au moins. « On peut y retourner je crois. » Comme il n’y a plus l’air d’avoir de mouvement affolés – de loin, elle croit. Et elle sort alors du bunker improvisé, tandis qu’elle sent les muscles se tendre un peu plus à chaque pas. C’est la peur qui lui fait ça ? Mais Lunaire s’oublie un peu, même si la fatigue fait trembler – ne craint rien comme elle est toujours bien accompagnée – et reporte l’attention sur la dame assise au-dessus d’eux. « Madame @Mizuchi ! » Qu’elle interpelle. « Vous avez besoin d’aide pour descendre ? » Parce que le sang dégouline et que les blessures sont salement profondes elle croit – il serait temps que l’infirmier lui vienne en aide une bonne fois pour toute, comme elle soupçonne Uruz avoir suffisamment de travail sur le front.

Mais voilà, elle n’a pas vraiment le temps de faire beaucoup plus, la lune, parce que les muscles sont raides, bien trop, et qu’elle chancelle, se raccroche au loup par instinct alors que la vision se brouille un peu plus. Et ce n’est pas de la fatigue, ou pas seulement, à ce stade-ci. « J’me sens pas bien. » A en bouffer la moitié de ses mots pour le coup – n’entend plus non plus, silence est pesant, ne trouve pas non plus l’odeur réconfortante de son homme. Et se laisse tomber un peu plus, n’a pas vraiment le choix, à l’impression d’être droguée, mais de celles dont il ne faut pas abuser. Et voilà, s’enchaînent finalement formes étranges et images dérangeantes – oh, elle sent que ça ne va pas être très sympa tout ça.

Résumé:

Dès:

Kitsune se fige alors qu'Aonyobo se pointe. Le calme après la tempête. Le choc, la sidération. Tout ça pour ça, pense une part de son être pendant que l'autre, la part humaine, ne parvient à décrocher son regard du cadavre qui git un peu plus loin. Morte. L'une des siens était morte. Plus la moindre étincelle de vie ne se dégageait du corps inanimé. Morte. Depuis combien de temps ? Quand était la dernière fois qu'elle avait vu Shishi en vie ? En état de choc, la renarde ne sait plus. Elle fait un pas en avant, sans vraiment s'en rendre compte, avant qu'une voix masculine, forte et emplie de colère, ne la fasse sursauter. Kitsune revient un peu à elle et décroche enfin le regard de Shishi. Aonyobo s'en va, elle l'attend. Lui a donner l'ordre de la suivre, mais ses jambes refusent. Quelque chose gronde au fond d'elle-même. Quelle dangereuse amie ricane une voix dans son esprit. Le prénom de la jeune-fille est prononcé par Hitodama. Mikan. Mikan Yamaguchi. La gorge de la japonaise se sert ; c'est plus dur de faire comme si de rien était quand la morte retrouve son identité. Corps qui flotte, Kitsune qui a envie de refuser l'ordre qui lui est balancé. Kitsune qui, pour une fois, aimerait être utile. Qui voit des gens blessés, autant mentalement que physiquement. Pourtant, une décision doit être prise. « J’arrive, Aonyobo. » Le ton est froid, comme de l'acier, aussi automatisé que les créations de la japonaise. Difficilement, elle s'approche de Hitodama, et s'accroupit à sa hauteur. « Hitodama ... » appelle-t-elle avec une douceur qui la surprend « On a besoin de toi. Shishi a besoin de toi. Tu la connaissais mieux que moi. Elle était bouddhiste, non ? Il faut au moins qu'elle parte en paix ... » le sanglot est refoulé. Il faut réfléchir en termes pratiques. Kitsune suivra Aonyobo, car elle pourra peut-être en apprendre davantage sur ce qu'il vient de se passer. Mais pour Shishi ... Non. Pour Mikan, c'était différent. Elle ne pouvait rien faire, pour elle, sinon être désolée. Et tandis qu'elle se relève, elle jette un rapide regard à l'étendue des dégâts. Elle le savait, qu'elle était pas sur un camp de vacances. Mais elle espérait qu'il faudrait un peu plus de temps avant que les ennemis s'en mêlent. Sauf si les ennemis faisaient déjà partie de l'île. C'était la raison pour laquelle garder son sang froid était si important. Garder son énergie afin de débusquer les traîtres. Son regard se pose à nouveau sur Aonyobo, à laquelle elle emboite le pas, une fureur froide dans le regard.

Assise, ou plutôt non, avachie au bord du toit, le regard perdu dans l'agitation fascinante du champs de bataille. Mizuchi fait peine à voir. Elle respire avec difficulté, concentrée sur l'action en contrebas pour ignorer la douleur qui émane de chaque centimètre de son corps. Ah tiens, non, les jambes allaient plutôt bien. Le ventre aussi, intact. Mais elle ne voulait même pas imaginer l'aspect de ses mains et de son visage.

Incapable de lever sa baguette une nouvelle fois pour attaquer, elle assista sans broncher à l'effondrement de Shishi, bien morte dans son enveloppe grisâtre, et la fuite de la hurleuse sur son rocher. Le cri se fit ressentir jusqu'au fin-fond de ses nerfs, dispersant peur, colère et souffrance comme si c'était ses propres émotions qui explosaient. Puis tout retombe. Entrée de la diva, qui balaie de ses ongles vernis la gravité de la situation. Mizuchi l'observa, silencieuse, inerte. Elle tentait de faire des liens. Comprendre quelque chose. Rien ne venait.

Son regard se porta lentement vers Hitodama, effondré, puis vers Uruz, remonté. Elle entendit d'une oreille qu'on l'appelait, d'en bas. La Lune la regardait avec inquiétude, mais elle semblait à sa manière bien plus mal à point que sa professeure. Rassemblant les forces lentement regagnées sur son perchoir, Mizu leva une main pour rassurer la jeune femme, un faible sourire aux lèvres. Sourire de dépit, de fatigue. Shishi n'était plus, et Kitsune opinait devant leur reine auto-proclamée. Mais personne ne semblait se préoccuper de ce qui, elle, ne quittait pas son esprit.

Où était partie la créature ? elle avait pris la direction de la forêt. Elle était affaiblie, furibonde : elle irait se réfugier là où elle penserait être en sécurité. Bordel, personne ne réfléchissait ici ? Mizuchi respira un grand coup, leva sa baguette. Oh, la mauvaise idée.

Bon bah sans surprise, rien ne fonctionne, aucun de ses pathétiques sorts de soin. Elle aurait bien voulu repartir, là tout de suite, histoire d'en finir avec cette chose qui venait d'assassiner sa recrue et de ravager le moral (entre autres choses) de tous ceux qui s'étaient battus. Ils auraient eu un aperçu de l'horreur de la guerre, peut-être. Bien que tout cela soit profondément inquiétant, et que Suhail ait raison : où étaient les autres directeurs ? ils faisaient la sieste ?

aie aie aie:

Que @Kitsune traîne à la rejoindre l'agace déjà considérablement. Qu'un des scandinaves (@Uruz) se mette à l'interpeler comme ça est juste la goutte d'eau qui fait déborder le vase. Aonyobo se tourne vers lui, regard glacial comme on ne lui a jamais vu, air mortellement sérieux. Peut-être pour la première fois depuis le début de l'aventure, on se dit qu'elle n'est peut-être pas que bonne à parler de ses ongles. "Que sais-tu de ma notion du commandement au juste ? Sans compter que je pense pouvoir affirmer que je suis plus apte à trouver des preuves qu'un guérisseur. Une de mes élèves est morte, désolée de tenir à ce que sa dépouille ne reste pas ainsi exposée. Maintenant, si vous voulez jouer au croque-mort, vous n'avez qu'à me suivre." siffle-t-elle avant de détourner les yeux vers Kitsune qui ne l'a toujours pas rejointe, occupée à réconforter une loque qu'elle identifie comme appartenant à sa délégation (@Hitodama). "Hitodama, relève toi et suis nous. Quant à toi..." ajoute-t-elle, posant ses yeux sur @Suhail. "J'ignore où est ta directrice ou même où sont les autres directeurs. Après tout, on est dimanche, c'est quartier libre, nous avons d'autres choses à faire que veillez sur vous et nous ne sommes pas non plus devins. Bref, il s'agirait de grandir et d'apprendre à vous défendre en autonomie. Nous ne sommes pas le deus ex machina arrivant pile quand la situation devient critique pour sauver vos peaux. Cela ne se passe rarement comme ça dans la vie, tu devrais le savoir." Sourire mielleux tranchant avec le regard froid, elle tourne de nouveau le dos à l'assemblée. "@Mizuchi, rejoins-nous dés que tu en as fini ici. @Ortiz, soignez les blessés." Ton n'acceptant pas la discussion. Elle assemble ses ouailles, ils ont un mort à pleurer.

Finalement, quelqu'un l'avait aidée à descendre précautionneusement du toit de la cuisine. La gravité de ses blessures était assez conséquente. C’était supportable, pour autant elle n’arrêtait pas de saigner et cela devait être réglé rapidement. Sa joue en particulier était profondément ouverte, et le sang de son visage s’en échappait encore. Elle était pâle comme la mort, grisâtre même, sentait la chaleur de son corps diminuer.

Une fois à terre, Mizu porta une main à sa tempe, prise d’un léger vertige. Un instant de recalibrage, avant d’approcher l’attroupement formé par les recrues sous le choc. D’en haut, elle avait suivi les échanges avec sa directrice, avait compris rapidement de quoi il en retournait. Ce que la jeune femme avait décidé de projeter sur eux. Aonyobo avait parlé. Shishi méritait qu’on lui rende les hommages dignement. Alors elle prendrait les choses en main, faute de mieux, et s’exécuterait. C’était tout ce qu’il restait à faire.

S’efforçant de faire meilleure figure, Mizu pénétra le demi-cercle qui s’était formé. Le silence était étouffant. Le souffle un peu court, elle observa Aonyobo partir avec le corps de Shishi et les Mahou dévastés. Enfin, dévastés, c’était encore à confirmer pour Kitsune, qui semblait quand même rechigner à marcher aux côtés d’un cadavre. Quand ils eurent disparu, elle demeurait la dernière asiatique sur les lieux du combat. Elle n’attendit pas que tout le monde reporte sur elle la colère qu’ils éprouvaient pour Ao, la peur de la créature, le deuil de leur numéro deux. Elle prit la parole, d’une voix basse mais claire.

« Vous devez tous être épuisés et en colère, et je le comprends. Mais reprenez-vous. Calmez-vous. Il faut concentrer notre énergie à ce que cette atrocité ne se reproduise pas, et surtout comprendre comment une créature pareille a pu pénétrer sur l’île. » Faire front. Repartir. Elle devait faire peur à voir, avec ses vêtements déchirés, ses cheveux collés de sang séché et son souffle court. « Nous nous occupons de Shishi. S’il vous plaît, si vous avez des notions de premiers secours, soignez-vous les uns les autres, Ortiz vous guidera. »

Elle jeta un regard en biais à l’infirmier, inquiète. Il y avait trop de blessés pour lui seul. Elle espérait qu’il soit raisonnable et accepte de l’aide. Puis son œil se reporta sur Suhail, qui semblait être le seul soldat sur pieds autour d’elle. Elle hésitait à lui demander de partir après la créature avec une équipe de volontaires. Renonça à l’idée. Il en avait fait assez pour aujourd’hui, et n’était pas qualifié pour ce travail.

« Je suis désolée d’avoir échoué à la sauver. » Sa voix laissait percer une fatigue qui pouvait aisément être perçue comme de la détresse. Son regard était brillant de larmes à cause de la fumée et de la fièvre. Elle tremblait un peu. « Restez ensemble. Aidez-vous. Et ne craignez pas la mort. » Là-dessus, elle s’inclina profondément devant eux et s’éloigna pour rejoindre le cortège funéraire de sa recrue.

Une fois hors de portée, elle fit apparaître de l’eau et une couverture, s’en couvrit les épaules et but longuement pour composer l’immense souffrance à laquelle elle venait d’assister. Elle resta là, plantée, quelques secondes entre deux mondes, et pénétra finalement chez les Mahou pour trouver l’équipage laissé plus tôt.